Le rôle des femmes est un pilier essentiel du développement durable et de la justice sociale. Leur autonomisation ne se limite pas à la croissance économique mais concerne également la réduction des inégalités, l’amélioration des conditions de vie et la promotion de la paix. Pour approfondir ce sujet, j’ai eu le plaisir d’interviewer Abdou Diouf. Agronome de métier et spécialisé en écotourisme, il est agent des parcs nationaux au Sénégal et conservateur de la réserve naturelle communautaire de Boundou gérée par le CORENA. Son expertise et ses expériences font de lui un acteur clé dans le développement de la région et des activités communautaires mises en place. 

Vulnérabilité féminine et inégalité

Comme l’indique Abdou, les femmes, en raison de leur statut de femme, sont plus vulnérables et victimes des aléas économiques. Il ajoute également qu’à cela s’ajoutent d’autres facteurs qui accentuent cette vulnérabilité et creusent un fossé. C’est le cas des femmes vivant en zones rurales qui sont davantage touchées par la pauvreté et, par conséquent, exclues des programmes et des dispositifs d’accompagnement en ce sens. Pour souligner cela, il prend l’exemple des femmes pour lesquelles il est très difficile d’accéder à la terre ou à des financements

Il ajoute à cela l’accès à l’éducation des femmes qui reste un enjeu majeur. Sans accès à l’éducation, les filles ont moins de chances d’acquérir les compétences nécessaires pour accéder à des emplois qualifiés, ce qui limite leurs opportunités économiques. Cela peut entraîner des niveaux de rémunération plus bas, un accès restreint aux opportunités d’emploi et une dépendance économique. Tout ceci ne fait que renforcer les inégalités de genre et à long terme, freine le développement. 

Favoriser une croissance économique inclusive

Comme Abdou le souligne, les femmes sont une partie importante de la population qu’il n’est pas possible d’ignorer. Le faire, c’est favoriser leur exclusion et augmenter le risque de pauvreté dans des contextes où elles sont déjà en situation de vulnérabilité. Il prend l’exemple des initiatives mises en place au sein de la réserve du Boundou qui ont porté leurs fruits et ont permis aux femmes de créer et développer des activités génératrices de revenus ou des groupements d’intérêts économiques, de prendre part aux réunions et prises de décisions, et pour certaines, d’occuper des fonctions au sein de structures étatiques et communautaires. Son expérience montre que ces résultats renforcent non seulement l’ancrage des activités de développement local, mais aussi celui de l’éco-citoyenneté et de la préservation de l’environnement dans un contexte où le changement climatique est une réalité. 

« Si on parle de changement climatique, il y a toujours des conflits et les femmes subissent ces conflits. Et c’est dans ce cadre-là qu’il faudrait vraiment les accompagner et les appuyer, surtout sur la base d’activités générées par les ressources de la zone. »

Abdou Diouf

Soutenir les femmes dans le renforcement de leurs compétences, financer leurs projets et leur offrir une place dans la société, c’est garantir un progrès durable. Les femmes ont la volonté de participer activement à leur autonomisation et à leur émancipation. Abdou soutient que cela se reflète dans leur engagement au sein des programmes de développement économique, notamment ceux mis en place dans la réserve. 

 

Accompagner le leadership féminin

Pour favoriser l’autonomisation et l’émancipation des femmes, il est nécessaire de mettre en place des programmes et politiques en ce sens. Abdou rappelle que ces programmes doivent être définis sur plusieurs années et prendre en compte différents volets : économique, environnemental, local etc. Il signale par ailleurs que le volet local est primordial car le développement doit se faire avant tout à cette échelle et auprès des communautés vulnérables, notamment les femmes. Il donne comme exemple des programmes d’entrepreneuriat et de promotion de la femme qui peuvent être mis en place et qui rencontrent un franc succès auprès d’elles dans la réserve. Et par promotion de la femme, il s’agit non seulement de sensibiliser et rappeler leur place dans la société, mais aussi et surtout, de leur donner cette place dans les différentes instances décisionnaires locales

Abdou fait savoir que ces programmes doivent refléter les choix et les besoins des femmes et non pas être des solutions imposées sans leur consentement ou diagnostic préalable, au risque de favoriser, une fois de plus, leur exclusion. Il souligne également la nécessité de mettre en place des programmes d’émancipation et de développement en zone rurale, là où les femmes sont davantage exclues et vulnérables. 

 

 

Le rôle des femmes dans le développement est incontestable et essentiel. Leur autonomisation ne se limite pas à un simple objectif économique mais touche à la réduction des inégalités, à l’amélioration des conditions de vie et à la préservation de l’environnement. Comme l’a démontré Abdou, investir dans l’éducation des femmes, soutenir leurs projets et renforcer leur place dans la société permet de créer un impact durable, à la fois sur le plan local et global. L’accompagnement du leadership féminin, à travers des programmes adaptés et inclusifs, constitue un levier puissant pour un développement plus juste et durable. Placer les femmes au cœur de la dynamique de développement, c’est favoriser une croissance économique inclusive, équitable et résiliente.