Mener un projet de développement ne nécessite pas forcément d’intervention extérieure. Il faut savoir qu’il existe sur place des structures qui organisent déjà la réponse aux besoins de développement. Elles sont organisées sous différentes bannières, comme des associations, des coopératives ou encore des collectifs de citoyens, et travaillent au développement de la société, de leur société. Pour mettre la lumière sur ces initiatives, j’ai eu le plaisir d’échanger avec Damien Laroche, coordinateur programme pour une ONG. Cette structure, dont la mission est d’encourager et accompagner les initiatives de développement des communautés locales, intervient sur plusieurs thématiques comme la santé, l’eau, l’hygiène et l’assainissement ou encore l’entreprenariat agricole. De par sa présence depuis presque un an maintenant au Cameroun, Damien a pu constater l’importance de promouvoir et soutenir les initiatives locales.
S’attaquer aux causes d’un problème
Le développement a pour objectif d’agir sur les causes d’un problème plutôt que les conséquences et c’est dans cette stratégie que s’inscrivent les actions de Tockem Développement. Damien souligne l’importance de répondre aux besoins primaires dans un premier temps, car les quelques exemples qu’il a mis en avant montrent bien qu’améliorer les conditions de vie favorise le développement et permet aux communautés de s’investir davantage dans des activités génératrices de revenus, pour les adultes, ou dans l’apprentissage pour les plus jeunes.
Il insiste également sur la nécessité de répondre aux besoins que les communautés ont elles-mêmes exprimé. Cela passe donc naturellement par la consultation et l’intégration de ces dernières, en somme, faire avec eux et non pas à leur place.
Renforcer les compétences locales
Il faut noter que les communautés, bien qu’en situation de difficultés, disposent de compétences et n’ont parfois besoin que de soutien, tel que le renforcement des compétences via la sensibilisation et la formation ou encore l’appui au financement par exemple, pour améliorer leurs conditions de vie. Damien cite l’exemple d’un projet mené par Tockem Développement dans le domaine de l’accès à l’eau potable où un comité des usagers de l’eau a été créé avec pour objectif d’amener à une adhésion et un engagement des bénéficiaires mais également afin de mettre à profit leurs compétences.
Toutefois, des difficultés peuvent persister lorsque l’appropriation du projet par les bénéficiaires ne se passe pas comme prévu malgré le travail fait en amont. Et cela, car les communautés peuvent se montrer réfractaires face à certains aspects du projet comme l’indique Damien en mettant en avant une situation similaire à laquelle il a déjà fait face. Ce n’est toutefois pas la difficulté majeure selon lui car même lorsque les populations sont sensibilisées et associées au projet, celui-ci peut se confronter aux autorités locales qui limitent, volontairement ou non, son développement et par conséquent le développement des communautés.
« On se retrouve avec des autorités locales qui peuvent éventuellement prioriser des intérêts politiques ou financiers, ou mêmes individuels, qui vont être différents des intérêts des projets de développement. »
Damien Laroche
Et Damien y a déjà été confronté à quelques reprises. Il prend comme exemple un projet de réseau d’eau mené en collaboration avec la mairie d’une localité d’environ 40 000 personnes. Malgré un projet bien ficelé, la mairie n’a pas tenu ses engagements et les habitants se sont retrouvés avec un projet défectueux dont les effets ne portent pas leurs fruits aujourd’hui encore, mais surtout, sans eau potable. Il a déjà fait face à d’autres situations similaires où les autorités bloquaient volontairement le développement du projet en refusant d’octroyer les autorisations nécessaires sans pot-de-vin en échange. Se pose alors rapidement la question de la considération des habitants par leurs élus. Néanmoins, et comme il tient à le souligner, des autorités locales sont tout de même sensibles aux besoins de développement de leurs populations et n’hésitent pas à accompagner au développement d’initiatives.
S’associer aux acteurs locaux
Il n’y a pas de secret, pour un projet de développement dont les effets perdurent sur le long terme, plusieurs conditions doivent être réunies. Nous pouvons reprendre ce qui a été cité précédemment, à savoir la prise en compte des besoins émis par les populations et la nécessité de les inclure dans le projet en valorisant leurs compétences. Damien ajoute également que la communication avec les différentes parties prenantes est primordiale pour un projet local réussi puisque ces dernières peuvent être nombreuses. On peut identifier les communautés bénéficiaires, les élus mais également les chefs traditionnels qui occupent une place importante en fonction de certaines régions dans le monde. Il souligne également qu’il est primordial d’accompagner les initiatives pour lesquelles il y a un réel engagement de ces différents acteurs, au risque de voir un projet qui n’aboutit pas.
Cet échange nous permet d’affirmer qu’associer les communautés mais surtout soutenir leurs initiatives est le b.a-ba de toute action de développement. Il en va de la capacité à répondre aux besoins identifiés ainsi que de la longévité du projet.